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L'insomnie a plusieurs causes

Source : Charles M. Morin Psychologue, professeur et chercheur à l’Université Laval du Québec

 

On parle d’insomnie soit lors que l’on a une difficulté à s’endormir à l’heure du coucher (insomnie initiale), soit lorsque l’on fait des réveils nocturnes fréquents ou prolongés, soit enfin quand on se réveille prématurément le matin avec une incapacité à retrouver le sommeil. Une personne peut souffrir d’un mélange de ces symptômes, ou encore peut changer avec le temps de symptômes.

Prendre plus de 30 minutes pour s’endormir, ou passer plus de 30 minutes éveillé au milieu de la nuit, avec une durée de sommeil inférieur à 6 heures 30 par nuit représente un problème d’insomnie. Si vous dormez 6 ou 7 heures par nuit et que vous vous sentez reposé le jour suivant, vous ne souffrez pas d’insomnie. Si vous avez de la difficulté à resté endormi ou à vous endormir au moins trois fois par semaine, vous faites probablement de l’insomnie.

L'insomnie est plus un problème d'éveil que de sommeil.


On peut souffrir d’une insomnie transitoire (problèmes de la vie, inquiétudes), à moyen terme (les choses peuvent encore rentrer dans l’ordre ou se dégrader) ou à long terme : l’insomnie devient chronique.

Qui est touché par l’insomnie ?

Pratiquement tout le monde peut souffrir un jour de problèmes d’insomnie à une période ou une autre de sa vie. Il n’y a pas de profil type de personnalité, mais certains facteurs vont augmenter le risque d’avoir des problèmes d’insomnie :

Le vieillissement : les personnes souffrent plus souvent d’insomnie en avançant dans l’âge, car le vieillissement du cerveau change le fonctionnement de l’horloge biologique.

Être une femme : en général, les femmes semblent plus prédisposées à l’insomnie alors que les hommes sont plus sujets à d’autres troubles tels que l’apnée du sommeil. Les changements hormonaux (règles, grossesse, ménopause) peuvent expliquer en partie que les femmes soient plus touchées par l’insomnie.

Avoir une histoire familiale d’insomnie : il semblerait que le fait d’avoir dans la famille des personnes souffrant d’insomnie soit un facteur de risque, bien que le lien génétique n’est pas été démontré.

Tendance à refouler ses émotions : cela peut se traduire en problèmes d’ordre physique incluant l’insomnie. Les gens qui n’expriment pas leurs émotions durant la journée ont tendance à traîner leurs problèmes au lit. Inévitablement, ils s’inquiètent et leurs efforts pour se débarrasser de pensées indésirables fonctionnement rarement.

– Anxiété et hypervigilance : Les personnes anxieuses ou hypervigilantes n’arrivent pas à décompresser à l’heure du coucher. Bien au contraire, c’est lorsqu’il n’y a plus aucune distraction que les pensées reviennent en force à l’heure de se mettre au lit.

– Hyperactivité mentale et physiologique : L’hyperexcitabilité mentale est une des caractéristiques les plus importantes. Ce terme décrit un état d’agitation mentale ou de tension musculaire qui persiste, en quelque sorte, jour et nuit. Les pensées se bousculent et la personne ne parvient pas à faire le vide. Le corps accompagne cet état : tension musculaire, battements cardiaques rapides et température corporelle élevée.

Les médicaments et substances : la liste des substances qui perturbent le sommeil est très longue (ex. Café, thé, tabac, alcool), et l’insomnie figure parmi les effets secondaires de nombreux médicaments.

Les maladies chroniques : plusieurs maladies chroniques augmentent le risque d’insomnie : l’asthme par exemple, l’insuffisance cardiaque, le reflux gastro-œsophagien, l’arthrite, les douleurs chroniques etc.

Conséquences de l’insomnie chronique

Souffrir d’insomnie chronique provoque divers types de conséquences. Tout d’abord, de la fatigue en journée (ce qui est différent de la somnolence). Cela se traduit souvent par une léthargie mentale et des problèmes de concentration et de mémoire. La motivation est aussi diminuée et un grand effort est requis pour accomplir ce qui est habituellement une tâche simple. La maladresse physique peut aussi rendre plus vulnérable aux accidents (accidents de la route, accidents du travail).

De façon surprenante, la somnolence n’est pas répandue même chez les insomniaques sévères. Ceux qui souffrent d’insomnie sont habituellement surexcités, le jour comme la nuit.

L’insomnie aigüe peut causer une détresse psychologique et émotionnelle considérable, surtout quand on la perçoit comme une perte de contrôle. Ceux qui luttent chaque nuit contre ce genre de difficultés deviennent plus souvent irritables, tendus et déprimés. Les personnes qui souffrent d’insomnie chronique peuvent aussi développer un sentiment d’impuissance : quoi qu’elles fassent, rien ne semble faciliter leur sommeil.  Une insomnie non traitée et qui dure au delà d’une année expose la personne à un risque de dépression.

L’incidence sur le moral peut rendre les relations interpersonnelles (familles, amis, collègues) plus difficiles. Cela peut aller jusqu’au retrait social et à l’évitement des gens.

Il est maintenant clair que l’insomnie chronique est associée à un risque accru d’être atteint de nombreux problème de santé. L’insomnie perturbe le contrôle de la satiété et augmente l’attirance pour les aliments gras et sucrés, et donc fait grossir. Chez les personnes soufrant d’hypertension, l’insomnie viendra augmenter et aggraver le problème.
 

Différents types d'insomnie

Insomnie aiguë

L’insomnie aiguë d’ajustement est celle qui est causée par un événement difficile ou un facteur stressant (deuil, perte d’emploi, détresse de tous types). Ce type d’insomnie dure quelques jours et disparaît en moins de trois mois. Généralement, ce problème se résorbe rapidement à la disparition du traumatisme ou des facteurs en cause. Chez les personnes plus vulnérables, il arrive que l’insomnie persiste et devienne chronique.

Insomnie psychophysiologique

On parle aussi d’insomnie chronique. L’idée est que la personne souffre tellement de ne pas dormir qu’elle finit par avoir peur de se coucher et de ne pas réussir à s’endormir : c’est une insomnie qui se nourri elle-même ! Vient alors un conditionnement négatif qui se crée entre le fait d’aller se coucher et l’angoisse de ne pas y arriver. Des angoisses de performance pour le sommeil apparaissent (peur de ne pas réussir à s’endormir ou à dormir suffisamment), avec une incapacité à s’endormir à une heure planifiée. Paradoxalement, le sommeil est bien plus facile en dehors de la maison. Des traitements cognitifs et comportementaux offrent de bons résultats.

Mauvaise perception du sommeil

Il s’agit ici d’une « vraie-fausse » insomnie. La personne est persuadée qu’elle souffre d’insomnie. Sa sensation, réelle, est qu’elle ne dort que quelques heures durant la nuit ou même pas du tout. Il ne s’agit pas de simulation : simplement ces personnes ont une mauvaise capacité à évaluer la qualité de leur sommeil. Ces personnes ne ressentent pas la sensation de dormir. Des examens polysomnographiques démontrent pourtant que ces personnes dorment de façon tout à fait satisfaisante.

Insomnie idiopathique

Cette affection est rare et se caractérise par une incapacité constante à obtenir une quantité appropriée de sommeil. Contrairement à l’insomnie psychophysiologique, cette insomnie demeure stable et n’est pas influencée par le stress. Elle survient dès l’enfance, et on pense qu’elle est causée par une anomalie du contrôle neurologique du système veille-sommeil.

Insomnie en relation avec un trouble mental

De nombreuses maladies mentales peuvent induire des troubles du sommeil. Il ne fait aucun doute que les troubles du sommeil sont particulièrement fréquents chez les patients qui présentent des psychopathologies. L’insomnie est souvent observée chez les patients présentant des diagnostics de phobie, de névrose, d’angoisse ou de troubles de la personnalité. De plus, des troubles d’endormissement et de maintien du sommeil apparaissent fréquemment chez les patients qui manifestent des épisodes psychotiques aigus.

Mauvaise hygiène de sommeil

L’insomnie peut être causée par une mauvaise hygiène du sommeil. Soit que la personne va avoir des activités qui vont encourager l’hypervigilance et donc altérer l’architecture du sommeil (exercices physiques extrêmes avant le coucher, prise de stimulants tels que la caféine, la nicotine, regarder la tv, tablette, jeux en ligne etc.). Soit que la personne ne s’offre pas des comportements et un environnement qui favorisent le sommeil (chambre mal aérée, trop chaude, animaux domestiques qui dérangent; rester trop longtemps au lit, ne pas respecter des horaires de coucher régulier etc…).

Insomnie comportementale de l’enfant

Les enfants peuvent paradoxalement « apprendre » à mal dormir. Les habitudes de sommeil sont inculquées par les parents dans leur façon de proposer à l’enfant quand et comment dormir. Des réponses inadaptées données à leur enfant au moment du coucher ou lorsque celui-ci ne veut pas dormir, peut entraîner une insomnie comportementale. Des ressources existent pour faire face à ce problème.

Insomnie due à une drogue ou à une substance

Même si l’alcool est le « somnifère » le plus utilisé sur la planète (!), il offre malheureusement une piètre qualité de sommeil à celui qui en use et en abuse (sommeil non récupérateur et de mauvaise qualité). D’autre substances peuvent entraîner des insomnies, telles que les médicaments (de par leurs effets secondaires) ou les drogues (souvent des excitants). Les somnifères pris en trop grande quantité ou trop longtemps peuvent entraîner de l’insomnie (on appelle ça un « rebond d’insomnie » : dès que la personne veut cesser de prendre ses somnifères, l’insomnie revient de plus belle, ce qui pousse la personne à les reprendre à nouveau).

Insomnie en relation avec un trouble médical

De nombreuses maladies et troubles médicaux peuvent nuire au sommeil et entraîner des insomnies. L’asthme par exemple, le reflux gastro-œsophagien, l’hyperthyroïdie, etc. C’est en traitant le trouble médical initial que l’on peut soulager la personne des insomnies qui ont sont la conséquence.

Insomnie non spécifiée

Ce terme désigne toutes les insomnies dont on ne connaît pas les causes ou qui ne semblent pas faire partie des insomnies citées plus haut.

Les dix commandements de l’insomniaque

Ces conseils constituent des éléments importants d’une bonne hygiène du sommeil et sont suggérés pour les patients souffrant d’insomnie avant même de mettre en place une médication ou un autre traitement.

1. Maintenez la plus grande régularité possible dans vos heures de sommeil. Réglez d’abord votre heure de lever et couchez-vous le soir lorsque vous ressentez le besoin de dormir. Même si c’est très tard dans la nuit, les heures de coucher finiront par se régulariser progressivement.

2. Maintenez la plus grande régularité possible dans vos heures d’exposition à la lumière et à la noirceur. Exposez-vous le plus possible à la lumière solaire le jour. Dormez dans la noirceur et demeurez dans la lumière tamisée la nuit si vous sortez du lit.

3. Détendez-vous mais évitez de faire une sieste si vous ressentez de la fatigue importante au cours de la journée.

4. Évitez d’utiliser de l’alcool ou des drogues pour vous endormir.

5. Quittez votre chambre si vous vous réveillez la nuit et que vous avez du mal à vous rendormir. Détendez-vous dans la lumière tamisée d’une autre pièce jusqu’à ce que vous ressentiez le besoin de vous rendormir. Évitez les activités stimulantes (ménage, travail, courriel, Internet) en pleine nuit.

6. Résistez à tout prix au désir de regarder l’heure la nuit ! Réglez votre réveil pour qu’il sonne à l’heure voulue et régulière de votre levée le matin.

7. Évitez l’utilisation excessive de substances stimulantes au cours de la journée (à moins de prescription médicale).

8. Réservez votre chambre à coucher pour le sommeil (et les activités sexuelles). Bannissez-en le travail, la télévision, l' i-pad, les cellulaires et toute autre activité stimulante.

9. Dormez dans un environnement calme, sombre, tempéré et bien ventilé.

10. Planifiez un temps de repos et de loisirs tous les jours, particulièrement en soirée.