Association Maladie de Tarlov - Arachnoïdite - Syringomyélie - Europe Quebec

Syndrome de la vessie douloureuse (Cystite interstitielle : CI)

 

La cystite interstitielle (CI), désormais appelée Syndrome de la vessie douloureuse, est une maladie inflammatoire de la vessie qui se caractérise par des envies anormales d’uriner (envies pressantes et/ou fréquentes) et par des douleurs importantes dans le bas ventre et la vessie, au niveau de l’urètre (canal transportant l’urine de la vessie vers l’extérieur) ou au niveau du vagin chez les femmes, parfois accompagnées d’une difficulté à uriner. La sévérité des symptômes est variable d’une personne à l’autre.

Alors que la cystite « classique » est une inflammation de la vessie causée par des bactéries, qui peut être traitée par des antibiotiques, la cystite interstitielle n’est pas une infection urinaire bactérienne. C’est une affection chronique, c’est-à-dire qu’elle dure dans le temps, dont les causes ne sont pas élucidées.

 

Prévalence

Il est difficile de connaître le nombre exact de personnes atteintes par cette maladie, qui est probablement sous-diagnostiquée. La prévalence (nombre de cas dans une population donnée à un moment précis) varie selon les pays. En Europe, les estimations vont d’une personne atteinte sur 12 500 à une personne sur 1500. Aux Etats-Unis, la prévalence est estimée à un individu sur 1500 environ.

 

Les personnes touchées

Si tout le monde peut être affecté, 90% des patients souffrant de cystite interstitielle sont des femmes. La maladie survient en moyenne entre 30 et 40 ans, et 25% des patients ont moins de 30 ans. Exceptionnellement, certains enfants peuvent présenter les symptômes de cette maladie, mais selon les critères officiels américains (voir plus loin « critères du NIH »), le diagnostic ne devrait être porté que sur les patients de plus de 18 ans.

 

Sa présence dans le monde

La CI peut atteindre les personnes de toute origine, mais la prévalence de la maladie semble plus importante dans les pays occidentaux et les pays nordiques.

 

Les causes

On ne connaît pas encore les causes de cette maladie, qui a longtemps été considérée comme d’origine psychologique, voire « hystérique ». Étant donné qu’il y a une grande variabilité dans l’intensité et la présentation des symptômes, beaucoup de chercheurs pensent que la cystite interstitielle regroupe plusieurs maladies, dont les causes sont multiples.

Une des hypothèses avancées concerne l’altération de la perméabilité de la paroi vésicale. L’intérieur de la vessie est normalement tapissé par une couche de protéines (glycosami-noglycanes notamment) dont le rôle est de protéger la paroi des composants agressifs et toxiques de l’urine. Or cette couche protectrice est déficiente (et donc perméable) chez

70% des personnes atteintes de cystite interstitielle. Les éléments toxiques (par exemple le potassium concentré) pourraient alors pénétrer la paroi de la vessie, provoquer une inflam-mation et déclencher la cystite.

Par ailleurs, les chercheurs ont isolé une substance appelée « facteur antiprolifératif » (APF) présente presque uniquement dans l’urine des patients atteints de CI. L’APF pourrait, chez ces patients, empêcher la croissance de nouvelles cellules vésicales saines et donc le renouvellement de la paroi de la vessie.D’autres études suggèrent qu’un problème neurologique (hypersensibilité des nerfs) pourrait contribuer aux douleurs ressenties dans la CI. Les autres hypothèses concernent des mécanismes allergiques, auto-immuns, génétiques ou environnementaux.

En effet, il semble que chez les patients, les cellules impliquées dans la réaction allergique soient plus nombreuses, surtout dans la paroi vésicale.

Quant à l’hypothèse d’une maladie à composante auto-immune, elle repose sur le fait que la CI est souvent associée à des maladies auto-immunes telles que la polyarthrite rhuma-toïde ou le lupus érythémateux disséminé. Une maladie auto-immune se déclare lorsque les défenses immunitaires, qui normalement ne s’attaquent qu’aux éléments « extérieurs » (bactéries, virus...), se retournent contre les cellules mêmes de l’organisme et l’attaquent.

En fait, l’organisme produit des anticorps (molécules de défense) nocifs, appelés auto-an-ticorps, qui entraînent l’autodestruction de certains tissus et occasionnent d’importantes réactions inflammatoires : ces anticorps ont été retrouvés chez certains patients atteints de CI. Une infection virale ou bactérienne ancienne pourrait être à l’origine du dérèglement du système immunitaire.

Enfin, des chercheurs pensent que des facteurs génétiques pourraient également entrer en jeu. Certaines personnes ont probablement une prédisposition génétique, c’est-à-dire qu’elles ont des gènes qui les rendent plus vulnérables et plus à même de déclencher la maladie. L’existence de plusieurs familles présentant des cas de CI sur plusieurs générations

étaye cette dernière hypothèse.

Ainsi, les hypothèses sur les causes de la CI restent nombreuses et il est tout à fait possible que cette maladie soit d’origine multifactorielle.

 

Contagion

Non, la cystite interstitielle n’est pas contagieuse.

 

Ses manifestations

Les symptômes sont variables d’un malade à l’autre, et peuvent être plus ou moins invali-dants, la maladie évoluant différemment chez chacun. Les symptômes caractéristiques sont des envies anormales d’uriner et des douleurs. La maladie évolue par poussées entrecoupées de périodes de diminution des symptômes. Les premières manifestations de la maladie peuvent apparaître spontanément ou débuter après une opération (hystérectomie ou autre intervention gynécologique), après l’accouchement, ou après une grave infection bactérienne de la vessie.

Les patients ressentent la plupart du temps un besoin fréquent d’uriner, et ce jour et nuit. Alors que les envies d’uriner normales sont espacées d’au moins deux heures et conduisent à effectuer 4 à 6 mictions par 24 heures, le besoin d’uriner en cas de CI est quasiment permanent. Le fait d’aller aux toilettes ne soulage presque pas le malade, et l’envie d’uriner peut revenir quelques minutes, voire quelques secondes après la miction. Cette envie parfois constante d’uriner amène les malades à uriner plus de 8 fois par 24 heures, 16 fois en moyenne et jusqu’à 50 fois dans les cas sévères. Cette « pollakiurie » peut être le seul symptôme dans les cas peu sévères ou au début de la maladie. Dans la plupart des cas il n’y que quelques gouttes parce que la vessie est vide (même si les malades ont l’impression qu’elle est toujours pleine). Cependant, chez la grande majorité des patients, il n’y a jamais de fuites d’urine involontaires.Ce besoin d’uriner est presque tout le temps urgent, accompagné souvent de douleurs et de spasmes. Souvent, à mesure que la maladie évolue, il existe une difficulté de plus en plus grande à uriner ou à vider sa vessie. En effet, les muscles entourant l’urètre se développent trop et finissent par mal se relâcher, rendant la miction difficile. La douleur, constante ou intermittente, peut être très importante dans la CI : généralement elle s’intensifie lorsque la vessie est pleine, et diminue transitoirement après la miction. Elle ressemble à celle d’une infection bactérienne mais est beaucoup plus violente. Elle peut être ressentie comme une brûlure, sous forme de spasmes, avec une sensation de pression,

ou comme des coups de poignard ou de lames de rasoir dans le vagin, la vessie et l’urètre.

La douleur irradie dans le bas du ventre, au niveau de l’urètre, ou dans tout le bassin jusqu’à la partie inférieure du dos dans certains cas. Elle peut également être ressentie dans l’aine et dans les cuisses. Chez les femmes, la douleur peut se manifester dans le vagin et chez les hommes, dans le pénis, les testicules, le scrotum et le périnée et lors de l’éjaculation. Par conséquent, les rapports sexuels sont douloureux pour environ 50% des patients. Beaucoup de femmes trouvent que leurs symptômes s’aggravent ou s’amenuisent avant et pendant les menstruations, probablement en raison des changements hormonaux qui agissent sur les cellules de la vessie.

Enfin, plus rarement, certains patients se plaignent aussi de douleurs articulaires et musculaires (type fibromyalgie, c’est-à-dire des douleurs diffuses, généralisées, pouvant toucher tous les muscles), de migraines et de problèmes gastro-intestinaux (type syndrome de l’intestin irritable). On ne sait pas encore vraiment si ces douleurs ont un lien direct avec la CI. On suppose plutôt que d’autres syndromes provoquant ces symptômes s’associent à la CI.

 

Explication des symptômes

Comme on ne connaît pas les causes exactes de la maladie, il est difficile d’en expliquer précisément les symptômes. L’inflammation permanente de la paroi de la vessie est à l’origine de la plupart des douleurs. Des petites plaies (glomérulations, voir plus loin) situées sur la paroi vésicale fragilisent la muqueuse et entraînent des contractions des muscles lisses de la vessie (muscles « automatiques » qui ne sont pas sous le contrôle de la volonté) ainsi qu’une diminution de la capacité à uriner.

 

Son évolution

La CI se caractérise généralement par des poussées suivies de périodes d’amélioration plus ou moins importantes, évoluant sur un mode chronique. Les symptômes peuvent varier en intensité au cours de la semaine ou même de la journée (crises de quelques heures ou de quelques jours), ou bien être constants pendant des mois ou des années, ou encore empirer progressivement. Même s’ils disparaissent totalement, une rechute est toujours possible, parfois après quelques années de rémission.

Par ailleurs, en plus des variations liées au cycle menstruel, les femmes peuvent constater une amélioration ou une exacerbation au cours de la grossesse ou après. La sévérité des symptômes et l’évolution de la maladie sont aussi fonction du type de cystite (avec ulcère de Hunner ou non, voir plus loin), qui répond plus ou moins bien aux traitements.

 

Son diagnostic, les examens

Même si elle est assez courante, la CI est encore très mal connue et il faut parfois attendre plusieurs années avant qu’un médecin fasse le bon diagnostic.Comme il n’y a pas de signes ou de marqueurs spécifiques à cette maladie, le médecin doit procéder par élimination des maladies ressemblantes avant de pouvoir conclure à une CI : il s’agit d’un diagnostic d’exclusion.

Les symptômes ressemblent de prime abord à ceux d’une cystite bactérienne, mais les analyses d’urine sont stériles (c’est-à-dire qu’il n’y a pas de bactéries témoignant d’une infection). Cependant, on peut retrouver des traces de sang microscopiques dans l’urine (microhématurie) ou des globules blancs (leucocyturie).S’il n’y pas d’infection et si aucun autre diagnostic n’a pu être fait, le médecin devra réaliser une cystoscopie avec hydrodistension de la vessie. La cystoscopie permet d’observer directement la paroi vésicale grâce à l’introduction d’une fibre optique (cystoscope) par l’urètre. L’hydrodistension, pratiquée en même temps sous anesthésie générale, va permettre

de dilater la vessie en la remplissant d’eau pour pouvoir observer les petits saignements (de la taille d’une tête d’épingle) dans la paroi de la vessie. Appelées « glomérulations », ces micro-hémorragies correspondent à des fissures de la paroi vésicale et sont un signe typique de la cystite interstitielle : elles sont présentes dans 95% des cas. Dans les formes plus sévères, on peut aussi observer une plaie (ulcération) de la paroi de la vessie appelée

ulcère de Hunner, relativement rare (10% des cas). Notons que si certains patients ressentent des douleurs plus importantes suite à

l’hydrodistension, 20 à 25% d’entre eux observent une amélioration des symptômes qui peut durer plusieurs mois. L’hydrodistension est donc parfois utilisée régulièrement à des fins thérapeutiques, même si l’organisme finit par s’y habituer et en ressent de moins en moins les bienfaits. La cystoscopie permet par la même occasion d’exclure certaines maladies, telles que des tumeurs ou des calculs vésicaux.

Un examen urodynamique et une cystomanométrie peuvent également être effectués pour évaluer la capacité de la vessie à retenir l’urine et déterminer à quel moment le malade ressent l’urgence d’uriner. Un tuyau souple et fin (cathéter) est inséré dans l’urètre afin de remplir la vessie et d’y mesurer la pression. Un deuxième cathéter est placé dans le rectum pour mesurer la pression dans l’abdomen. En cas de CI, la capacité cystométrique (volu-

métrique) de la vessie est souvent réduite et les symptômes douloureux apparaissent dès qu’on atteint cette capacité.

Par ailleurs, pour faciliter le diagnostic de la CI qui est, comme on l’a vu, un diagnostic d’exclusion uniquement, le National Institute of Health (NIH), aux Etats-Unis, a établi un protocole rassemblant divers critères diagnostiques.